jeudi 17 juillet 2008

Les grandes migrations













On les a vus venir dès le début du mois de juin, comme d’habitude. Ils arrivent en couples. C’étaient plutôt des individus d’âge mûr, surtout au début. On voit qu’ils n’ont pas de progéniture à leur charge. Autrefois ils étaient assez stables, ceux-là. Ils s’installaient sur une plage et n’en bougeaient guère, se protégeant du soleil et allant, de temps en temps seulement, faire trempette à l’endroit où les vagues allaient mourir ... quand les vagues n’étaient pas trop fortes. Ils arrivent vers quinze heures, après avoir fait la sieste, et ils repartent quand le soleil commence à baisser, un peu après dix huit heures. Ils sont calmes et on ne saurait su quel langage ils parlent, tant ils font peu de bruit.


Pendant tout le mois de juin ils continuent à arriver. Peut-être que le nombre d’arrivants augmente un peu à partir de la mi-juin mais ils ne forment pas de gros attroupements : Deux, trois couples ensemble parfois, guère plus. Il faut reconnaître que cette tranche d’âge est devenue, de nos jours, beaucoup plus mobile et beaucoup plus grégaire, beaucoup plus bruyante aussi. qu’autrefois : On les croirait plus jeunes !
Mais ce sont toujours ceux-là qui arrivent les premiers.






C’est vers le milieu de juillet que les autres arrivent, venant d’où ? _ De partout, des quatre directions cardinales et même de toutes les autres directions de la rose des vents. Ceux-là, ils arrivent en groupes : Toute une famille à la fois ... Les jeunes adultes sont accompagnés de leur progéniture. Chaque couple est suivi d’un, deux, trois ... jusqu’à quatre ou cinq jeunes immatures de tailles différentes. On retrouve ces groupes familiaux sur le sable, parfois dès le matin. On reconnait les mâles à leur ventre bien arrondi et leurs compagnes à la largeur de leur fessier, (Encore qu’il soit bien évident que la plupart se donnent beaucoup de mal pour avoir l’air de cupidons et de sylphides, mais .... ). Ils se vautrent sur la plage, crient, courent, sautent, plongent, nagent, jouent, caquettent. Ils dorment beaucoup et souvent : Leur peau huilée dore au soleil, rougit, brunit, brûle parfois même, en se couvrant de cloques. Certains ne quittent la plage que lorsque leur peau se détache en lambeaux et se soulève en lanières. Les petits s’éclaboussent en hurlant, c’est leur passe-temps favori.


On peut observer que les adolescents s’éloignent parfois du groupe familial. De parade en parade, cela finit souvent dans les dunes ou dans le secret des forêts.










Juillet et août constituent le temps des parades et des appariements, passagers ou plus ou moins durables. Beaucoup cessent dès la fin août et les couples qui paraissaient les plus étroitement liés se séparent alors. Certains, pourtant peuvent durer ...


Pendant ce temps là, les parents semblent pleins d’indulgence. Ils laissent aller, se souvenant peut-être de leur jeunesse.




Au moment où le soleil se couche, les adultes et les petits s’en vont. Les adolescents, parfois, restent et s’adonnent à des jeux plus sérieux.
*
De qui sommes-nous en train de parler ? _ Des otaries, des éléphants de mer, des phoques ou bien des manchots-empereurs ?


Il est vrai que tout ce que je viens d’écrire pourrait être dit à propos des habitants de l’Arctique ou de l’Antarctique ... Corps huilés, lisses, se roulant dans les sables et dans les vagues, atteignant les plages toujours aux mêmes dates, les abandonnant tous ensemble pour des destinations inconnues, grognant, se prélassant, dormant, dormant beaucoup au soleil ...








Mais c’est des hommes que je parle. Des hommes et des femmes qui “sont en vacances”. Arrivent les premiers ceux qui, ayant pris de l’âge, n’ont plus charge d’enfants.


Les suivent, arrivant à la plage pratiquement le même jour, à la même heure, les jeunes et les groupes familiaux. Ils repartiront tous le même jour ou presque, avec leurs enfants ... Seuls resteront encore un peu les couples âgés ... Beaucoup d’entre eux se déplacent maintenant en camping-cars, les autres logent dans des mobile-homes en matière plastique.


Qu’est-ce qui les fait migrer ainsi ?

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