mercredi 16 avril 2008
LES MARIÉS DE CHAGALL
-” Je ne sais pas très bien ...”
-”Qu’est-ce que tu nous racontes ? - Il te suffit de décider ...”
Il y a de la myrte et du romarin, des phlox, des colchiques et des asphodèles, de l’origan que l’on nomme aussi marjolaine ... Il y a de la menthe et du basilic, de la verveine et du serpolet, de la sauge et de l’estragon. Il y a des canneliers, des eucalyptus et des lauriers ... Laurier-rose, laurier-tin, laurier-sauce et laurier-cerise.
“Il n’y a pas tout cela, dis-tu ? - Si, puisque je le décide. Il suffit de décider.”
Montagnettes, collines en amphithéâtre. L’une des collines écorchée ... Pourquoi celle-là ? Pelée par le vent ... Cailloux et terre rouges. Les autres douces, rondes, revêtues de garrigues. Toits d’un village tassé à l’angle du chemin.
Je sais que vers le sud, il y a la Méditerranée. Le bleu du ciel vient de là-bas, sans doute. Il aura débordé les pentes.
Près du village, une mer de lavandins violets. Je sais qu’au-delà, maintenus à distance, il y des platanes, mais des girofliers aussi, des mahogani ( Que pensez-vous de ce nom-là ?), des magnolias, flamboyants, tulipiers, micocouliers et arbres de Judée ...
-”C’est du Douanier Rousseau !”
-”Cela est.”
Un petit nuage rond, gros comme une fleur de coton ... Il sert de lustre. Il réfléchit la lumière du soleil. Le soleil, lui, il a déjà roulé de l’autre côté des sommets. Lumière douce et claire.
Odeurs et parfums. Les âmes sont légères. Une perdrix rappelle ... C’est ainsi ... Je le veux ... Appelez-la bartavelle si vous voulez.
Arrivent les mariés. Ils flottent au-dessus des lavandins. Ils nagent. Mariés de Chagall portés par les airs, se tenant par la main. Elle tient un bouquet. Lui, il tient une rose. Le bonheur forme traîne et les accompagne; Les violons sont là, au nombre de trois, venant d’un pays très lointain si l’on en croit leurs gilets chamarrés. Ils glissent par-dessus les mimosas.
Une musique chante, elle-aussi venue d’ailleurs, d’autres espaces, et d’autres temps de mémoire. Le nuage-lustre illumine la chapelle des bergers, minuscule, blanche, entourée de pâquerettes et de bluets. Je choisis de faire grimper une clématite au-dessus du portail. Tout près, il y a un cyprès.
La noce est entrée. Ils sont assis sur les bancs de bois. Le portail s’ouvre à deux battants. Un pinceau touche les voilettes, capelines, écharpes, cravates et foulards. Parfois il pose ses couleurs un peu à côté. Elles se prennent alors à exister pour elles-mêmes, indépendamment des formes. C’est pourquoi on les voit décalées un peu ...
Voix profonde chantant l’Ave Maria. D’où venue ?
Qui déroule des idées de larges fleuves et de longues plaines. On y sent des prières et des larmes, des regrets mais aussi des espoirs.
Dominique et Martine se sont choisis devant Dieu et devant les hommes. J’en témoigne. Ils se sont posés un instant, devant l’autel ... Le temps d’échanger leurs promesses et leurs anneaux ... Mères attendries, pères gauches.
Couple nimbé de lumière. Flamme d’un grand cierge ... Nouvelle lévitation. Les mariés flottent dans l’allée, à hauteur des têtes. Instant tiède et palpable. Une aïeule essuie une larme.
Le voile s’accroche un peu à la clématite. Le couple débouche dans la pleine lumière. Photo.
Sonne la cloche. Les violons s’envolent à nouveau. S’envolent les écharpes, les chapeaux, les cravates et les pochettes, en sinueuse guirlande. S’envolent les couleurs : bleus, rouges, verts, roses, violets, les ors. Le champ de lavandins lui-même s’étire, se déroule, flotte à mi-pentes.
Alors arrivent les bouvreuils, les alouettes et les bruants, roitelets, rouge-gorge et gorge-bleue. Il y a même (je le veux!), le colibri-topaze, l’oiseau-lyre, le sifilet, le couroucou. Mais ceux-là arrivent juste au moment où les mariés passent sur les toits du village.
“Le couroucou ... Splendide, non ?”
Mille ans de bonheur aux nouveaux mariés !
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